samedi 1 décembre 2007

Compte de mots – 01 décembre




Ballade sous la pluie

C’est un peu paradoxale de parler de pluie en cette journée de soleil et de froid (-13c) mais je n’ai pas choisi de lire ce livre ; c’est lui qui m’a choisi d’une certaine façon. Et c’est à une bien belle ballade sous la pluie que nous invite Pierre Yergeau. Un ballade sous la pluie dans un Montréal des années 70, un Montréal tout en poésie. Le genre d’écriture qui habituellement, à le don de m’épuiser, par la fausseté de ses sentiments. Mais ici, tout au contraire, la poésie de Yergeau est authentique, belle. L’histoire n’est qu’un prétexte à une ballade dans Montréal.

« Je me souviens qu’une pluie d’un vert bilieux
battait les pavés de la ville. C’était une pluie
de fin septembre, monotone comme le
grincement d’un chronomètre, qui tombait
de nuages aux ventres turgescents. [...]
Les piétons se couvraient d’un porte-document
renversé sur la tête, ou d’un sac de plastique
contenant quelques emplettes faites
hâtivement à l’heure du dîner. La pluie leur
était un phénomène étranger. Une conspiration
dominée par la répétition et ses éléments variables.
»
(P.9)

Grosso modo, c’est l’histoire d’un détective privé et paumé, qui se voit confier une bien drôle d’enquête par une mystérieuse femme. Un roman policier alors ? Non. Et puis, je le répète, l’histoire n’est qu’un prétexte. C’est le reste qui compte.

« Je parvins à rejoindre ma bagnole avant que mes
vêtements ne soient complètement détrempés.
Une auto américaine des années soixante, aux
amples ailes rongés par la rouille. Je démarrai et
laissai le moteur tourner un instant. [...]
J’ouvris la radio, passait d’un poste à un autre
avant de laisser l’aiguille à une station où jouait
une musique empressée, faite d’un éclatement
de guitare acoustique et de coups de cymbales.
»
(P.65)

Une écriture en image et en finesse. Pas un seul moment je me suis ennuyé, regrettant presque d’arriver si vite à la fin. Et c’est sans se presser qu’il faut lire cette Ballade sous la pluie de Pierre
Yergeau. Comme par une journée de soleil et de froid...

J’ai souris en lisant ceci :
« J’ouvris la radio, passait d’un poste à un autre avant de laisser l’aiguille à une station ».
Si vous avez moins de 35 ans, je ne crois pas que cette phrase soit compréhensible pour vous ;-)

Pierre Yergeau
Ballade sous la pluie
Éditions L’instant même
Québec, 154 pages. 1997.
ISBN : 9782921197908
CCR : 111,1.r/YER

2 commentaires:

Jules a dit...

"Si vous avez moins de 35 ans, je ne crois pas que cette phrase soit compr�hensible pour vous"

C'est quoi ces pr�jug�s? ;) Quand m�me!

Bob August a dit...

N’ai-je pas raison ? Une anecdote : il y a quelques mois déjà, j’ai passé une fin de semaine chez une amie qui habite dans les Laurentides. J’avais avec moi uniquement mon appareil photo de type argentique. La petite fille de mon amie (une gamine de 4 ans, très éveillée) me demande de « voir » les photos. Je lui explique donc que c’était impossible. Pas satisfaite, elle demanda à voir l’appareil photo. Vous auriez du voir son regard... Pas de la déception, mais de l’incompréhension ; pour elle, dans sa conception du monde, il n’existe « que » des appareils de type numérique d’où il est possible de voir les photos prises par le biais de l’écran située au dos de l’appareil. Elle ne pouvait concevoir « autre » chose. Ben c’est un peu la même chose avec « l’aiguille à une station » de Yergeau : il y a toute une génération de gens qui ne pourront s’imaginer un jour qu’il y avait un cadran (dial) avec une aiguille (généralement rouge) pour chercher les postes de radio. C’est la même chose pour le cadran (dial) d’un téléphone à roulette !

Je pense que je commence à me faire vieux !