
Ballade sous la pluie
C’est un peu paradoxale de parler de pluie en cette journée de soleil et de froid (-13c) mais je n’ai pas choisi de lire ce livre ; c’est lui qui m’a choisi d’une certaine façon. Et c’est à une bien belle ballade sous la pluie que nous invite Pierre Yergeau. Un ballade sous la pluie dans un Montréal des années 70, un Montréal tout en poésie. Le genre d’écriture qui habituellement, à le don de m’épuiser, par la fausseté de ses sentiments. Mais ici, tout au contraire, la poésie de Yergeau est authentique, belle. L’histoire n’est qu’un prétexte à une ballade dans Montréal.
« Je me souviens qu’une pluie d’un vert bilieux
battait les pavés de la ville. C’était une pluie
de fin septembre, monotone comme le
grincement d’un chronomètre, qui tombait
de nuages aux ventres turgescents. [...]
Les piétons se couvraient d’un porte-document
renversé sur la tête, ou d’un sac de plastique
contenant quelques emplettes faites
hâtivement à l’heure du dîner. La pluie leur
était un phénomène étranger. Une conspiration
dominée par la répétition et ses éléments variables. »
(P.9)
Grosso modo, c’est l’histoire d’un détective privé et paumé, qui se voit confier une bien drôle d’enquête par une mystérieuse femme. Un roman policier alors ? Non. Et puis, je le répète, l’histoire n’est qu’un prétexte. C’est le reste qui compte.
« Je parvins à rejoindre ma bagnole avant que mes
vêtements ne soient complètement détrempés.
Une auto américaine des années soixante, aux
amples ailes rongés par la rouille. Je démarrai et
laissai le moteur tourner un instant. [...]
J’ouvris la radio, passait d’un poste à un autre
avant de laisser l’aiguille à une station où jouait
une musique empressée, faite d’un éclatement
de guitare acoustique et de coups de cymbales. »
(P.65)
Une écriture en image et en finesse. Pas un seul moment je me suis ennuyé, regrettant presque d’arriver si vite à la fin. Et c’est sans se presser qu’il faut lire cette Ballade sous la pluie de Pierre
Yergeau. Comme par une journée de soleil et de froid...
J’ai souris en lisant ceci :
« J’ouvris la radio, passait d’un poste à un autre avant de laisser l’aiguille à une station ».
Si vous avez moins de 35 ans, je ne crois pas que cette phrase soit compréhensible pour vous ;-)
Pierre Yergeau
Ballade sous la pluie
Éditions L’instant même
Québec, 154 pages. 1997.
ISBN : 9782921197908
CCR : 111,1.r/YER