lundi 22 octobre 2007

Billet sur la langue - 22 octobre

Je suis un épicier...

N’ayez crainte, je ne sors pas du placard en avouant exercer le métier d’épicier plutôt que celui d’archiviste ! Non, mais en lisant le très beau texte sur la langue de notre amie « Le Vieux Bandit »[1], je n’ai pu m’empêcher de repenser à Octave Crémazie (1827-1879) et son peuple d’épicier :

« J’appelle épicier tout homme qui n’a d’autre savoir
que celui qui lui ait nécessaire pour gagner sa vie
».
- lettre du 10 août 1866 à l’abbé Casgrain

Trop souvent, on se contente du peu que l’on a, on s’assoit sur ses (pauvres) lauriers et on s’imagine que c’est assez pour avancer dans la vie. Mais est-ce vraiment assez ?

« Parfois, côté boulot, je suis un peu découragée. Il y a, d’un côté, des tonnes de gens qui ne savent pas écrire [...] et de l’autre, tout un tas de gens qui ne savent pas lire »
- Vieux Bandit (Op. Cit.)
je l’avoue, je fais partie de la première catégorie. Quiconque parcours mon blogue aura vite compris que je maîtrise la langue française que de façon approximative ; mon texte est remplis de fautes, d’anglicismes. Il me serait facile de blâmer mes maîtres du passé, le système d’éducation, le manque de temps, Internet (tout est de la faute d’Internet, non ?). Mais je dois surtout me blâmer moi pour une telle incurie. Je suis un épicier.

Mais ce qui est surprenant, c’est de constater que malgré des lacunes évidentes en français, j’ai tout de même pu me hisser jusque sur les bancs de l’université et décrocher un diplôme (il est vrai que de mon temps, il n’y avait pas d’examen d’entrée à faire. Pire : j‘ai même pas fait le cégep !). Je suis un épicier.

Encore plus ? j’ai réussis, d’une certaine façon, à berner tous mes employeurs avec mon français écrit. Est-ce donc dire que savoir lire compte plus pour un archiviste que de savoir bien écrire ? Ou peut-être que le français de mes employeurs n’était pas meilleur que le mien ! Je ne sais pas. Je suis un épicier.

« Ce qui me hérisse, au fond, c’est le manque de rigueur que je vois partout. »
- Vieux Bandit (Op. Cit.)
Oui, Vieux Bandit, le manque de rigueur est partout. Mais est-ce une raison suffisante pour baisser les bras et se faisant, perpétuer cette état de chose ? Je ne pense pas. Je suis un épicier.

Chose certaine ; je ne pourrai jamais blâmer ma mère d’avoir encouragé une quelconque forme de laxisme, elle qui à toujours vue à remplir la maison de livres et de disques et qui n’a jamais été avare de son rare temps libre pour nous donner un coup de main avec les devoirs et leçons. Même après une dure et longue journée de labeur au boulot comme secrétaire. Ou après avoir fait le souper, la vaisselle et tout le reste. Je suis un fils ingrat. Je suis un épicier.

« Écrivez! Mais de grâce, reconnaissez vos limites, et par pitié, repoussez-les! »
-Vieux Bandit (Op. Cit.)
Je tacherai de faire mieux dans le futur. Mais j’ai mes limites, je le reconnais. Je suis un épicier...


Note : vous pensez sans doute que sous une forme un peu tordu d’humour, mon billet tente de ridiculiser le beau texte de VB ? C’est que vous ne connaissez pas la vénération que je porte à cette fille - bon d’accord, vénération est sans doute un peu fort : disons plutôt que c’est de l’admiration sans borne ;-)


[1] http://www.vieuxbandit.org/blog/2007/10/12/reflexions-de-travail/

4 commentaires:

Anonyme a dit...

(Bon ça y est: je rougis!)

Tu sais, on est tous épiciers. Pour tordre un peu une expression de ma mère qui parle plutôt de "téteux", vaut mieux un épicier qui sait qu'il est épicier qu'un épicier qui ne sait pas qu'il est épicier!

J'ai pris la langue parce qu'elle me touche; j'aurais pu prendre un autre exemple... mais au fond, même si je crie et que je m'impatiente, je sais que je ne peux pas demander à tout le monde de faire mon pari, qui est de toujours vouloir être mieux, connaître plus, et de toujours prendre, oh, pas le chemin le plus difficile, mais celui-là, à côté, qui n'est ni le plus droit ni le plus plat... Dans un monde peuplé de "moi", mon cher, il y aurait de bien nouveaux problèmes! ;-)

Côté études... j'en ai vu, des étudiants se rendre loin sans pouvoir aligner deux mots. Je ne sais pas si on les tolère pour les caser en enseignement où, croit-on, ils feront moins de ravages (!) ou si on a juste baissé les bras. Question de priorité! Si j'étais prof à l'université, j'vous dis pas le nombre de plaintes que mon employeur recevrait, d'étudiants qui ont coulé pour fautes grammaticales. Pourtant je ne suis pas pro-université-à-tout-prix, loin de là! Et la langue correcte ne devrait surtout pas appartenir uniquement aux diplômés!

Bob August a dit...

@ Vieux Bandit
Si j'ai tant tardé à répondre c'est qu'il n'y a rien a rajouter : tout est là, dans ta réponse.

Merci de m'avoir donné l'occasion - pour la deuxième fois - de "piquer" tes idées ;-)

Ah ! oui, pour l'admiration sans borne, je suis sincère... Mais je suis sans danger : c'est l'admiration d'un "fan", pas d'un fanatique - Herb, il est INUTILE de composer le 911 ;-)

Anonyme a dit...

HAHAHAHA! T'es sûr que c'est pas toi, dans la fourgonnette blanche stationnée devant la maison? (Merde, moi qui viens de lui envoyer une pizza végé...)

Tiens, j'ai attrapé au vol Marie Laberge à Radio-Canada, qui disait que si les gens commencent à croire qu'il faut une intelligence supérieure, un cours classique ou je ne sais plus quoi pour toucher à la culture et être touché par elle (ceci devient une citation de moins en moins exacte), qu'à ce moment-là la culture disparaîtrait. Bien intéressante, cette auteure que je n'ai jamais encore lue!

Le "piquage" d'idées, à ce que je sache, c'est un bon début de discussion! (J'ai une réflexion parallèle sur la notion de plagiat... même si je suis bien d'accord que c'est un truc horrible à faire, en même temps je crois qu'on va trop loin. Reprendre mot à mot, c'est mal, mais si Lafontaine n'avait pas piqué à Ésope (qui a piqué partout sans doute!), on ne les connaîtrait pas, les fables, et un conteur africain n'aurait pas pu en tirer un magnifique conte que j'ai eu le plaisir d'entendre au festival du conte! Même chose pour bien des pièces de Molière, et quoi encore...)

Bob August a dit...

>c'est pas toi, dans la fourgonnette >blanche stationnée devant la maison?
Tu as dit du mal de "W" récemment ? Ça pourrait expliquer la présence de la camionnette ;-)

>Le "piquage" d'idées, à ce que
>je sache, c'est un bon début de >discussion!
Oui car au fond, qui est "propriétaire" d'une idée ? Hum...