vendredi 1 janvier 2010

Compte de mots - 01 Janvier



Beethoven, auteur de science-fiction ?


Beethoven croqué sur le vif lors d’une de ses promenades, par J.-D. Böhm. Dans son dos, un des «carnets intimes» ?


Rassurez-vous, mon rhume n’a pas atteint mon cerveau de façon irréversible - pas encore du moins ; je ne mélange pas Beethoven avec Asimov. Mais si je me pose la question, c’est que je suis tombé sur quelques paragraphes assez déroutant dans un petit livre intitulé «Carnet Intimes» de Beethoven, dont celui-ci :

«La substance dont sont formés les habitants
de diverses planètes, voire celle des animaux,
des plantes mêmes qui vivent sur ces planètes,
doit-être d’autant plus légère et fine,
l’élasticité des êtres ainsi que leur
structures d’autant plus parfaites qu’ils se
trouvent à une plus grande distance du soleil.
»
PP.55-56

Incroyable de penser que l’auteur de l’Opus 61 avait des préoccupations digne d’un auteur de science-fiction... en 1815 !

Dans ses carnets, Beethoven ne se contente pas de parler de la vie sur d’autres planètes ; il a aussi quelques préoccupations plus terre-à-terre, comme sa surdité :

«Ne cherche plus à cacher ta surdité ; que
l’Art aussi en ait connaissance.
»
P. 18

Ou de sa musique ;

«À mon dernier concert dans la grande salle de
la Redoute, l’orchestre se composait de dix-huit
premiers violons, dix-huit seconds violons,
quatorze altos, douze violoncelles, sept
contrebasses, deux hautbois.
»
P. 26

«Depuis le mois de mars jusqu’au 15 mai 1814,
réécrit et corrigé l’opéra Fidelio.
»
P. 27

Mais je crois que le passage qui m’a le plus marqué est celui-ci :

«Jamais une partition n’est copiée aussi exactement
que l’a composée l’auteur.
»
P. 35
Pourquoi ? C’est qu’il fallut attendre la fin du XXe siècle, avec la publication du catalogue des symphonies de Beethoven selon l’édition Bärenreiter pour corriger les fautes, parfois graves, induites dans les symphonies de Beethoven, à cause d’une copie imparfaites... (pour la petite histoire, Kent Nagano, chef de l’OSM utilise uniquement l’édition Bärenreiter lors de l’exécution des symphonies de Beethoven).


À traverse ses notes, j’ai aussi découvert un Beethoven profondément croyant, le mot Dieu se retrouvant à toutes les deux pages environ. On découvre aussi sans grande surprise un Beethoven tourmenté par l’éducation de son neveu. Il avait aussi sa petite idée idée sur l’ordre de ses livres dans sa bibliothèque :

«À propos de ma bibliothèque : les grands livres
doivent être placés verticalement et de façon à
ce que l’on puisse les prendre commodément.
»
P. 45


Les «Carnets intimes» sont moins des confessions que des notes jetées en vrac. Pas même un journal. Et le désordre des notes laisse penser qu’elles n’étaient pas destinées à être publiées. Ici, Beethoven ne s’adresse qu’à lui-même. Il n’écrit pas pour la postérité ; il l’a fait - et de façon magistrale - avec sa musique.
À la fin du livre, on retrouve une section intitulée «commentaires», qui reprends toutes les notes de Beethoven, avec sa mise en contexte. Intéressant.

terminons avec un anecdote : j’ai trouvé, entre les pages 64 et 65, un transfert d’autobus de 1,25ps, «Plaza Universidad a Mollet» sans date.


«Carnet Intimes»
L.V. Beethoven
Traduction de M.V. Kubié
Éditions R-A Corrêa, Paris
1936. 119 pages
ISBN : Ne s’applique pas
CCR : en attente de classification

Il existe une réimpression pas mal plus récente de ce livre (2005) chez Buchet - Chastel, pour 10 euro (ISBN 978-2-283-02165-1). Et si le compositeur vous intéresse, je vous recommande deux autres livres :

«Beethoven»
Divers auteurs chez Hachette, collection Génies et réalités, 1961.
On s’attarde ici surtout à la vie de Beethoven.

«De Mozart en Beethoven»
Eric Rohmer
Actes Sud, collection Un endroit où aller, 1996.
Essai sur la notion de profondeur en musique. Des connaissances en musique sont nécessaires pour bien comprendre ce livre écrit par le grand cinéaste Eric Rohmer.



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