Les limites d'un traducteur.
J'ai débuté hier la lecture du roman «Le monde de Barney» («Barney's version» en anglais) de Mordecai Richler. J'ai longuement hésité avant d'acheter la version traduite car «Le monde de Barney», qui est un roman très touffu et très ancré dans Montréal, est un piège pour quiconque voudrait s'attaquer à sa traduction : un piège car il fallait à tout prix éviter une traduction tout parisienne et en même temps, éviter une traduction frisant le parler de la rue typiquement montréalais. C'est pourquoi, avant d'acquérir le roman, j'ai lu plusieurs pages ça et là. Et je dois avouer que la traduction de Bernard Cohen me paraissait plus qu'honnête. Et après avoir lu une cinquantaine de pages du roman, je le pense encore. Mais même un bon traducteur a ses limites. Et c'est évident, Bernard Cohen n'est pas un traducteur d'ici. Autrement il n'aurait pas commis autant de bourdes ;
«Avec Maurice Richard, dit "la fusée"...»
(p. 12)
Pardon ? La fusée ? Mais il n'y a pas une seule personne au Québec pour traduire le surnom de Maurice Richard (le Rocket) en... fusée ! Merde ! le Rocket c'est... le Rocket. Même moi qui ne connaît rien au hockey - et au sport en général - je sais ça !
Et à traduire sans vraiment connaître, ça donne parfois des phrases surréalistes :
«...perdirent par "quatre jeux à un" face aux Rangers de New York lors des demi-finales de la "Stanley Cup". Pour "la fusée" toutefois, l'année n'avait pas été si mauvaise...»
(p. 12)
ou encore
«... l'arbitre Dalton McArthur, ce faux drêche patenté, infligea "un carton rouge" a Dickie Moore...»
(p. 31)
Un carton rouge, au Hockey !?! Sacrement ! Heureusement, il n'a pas traduit les «Rangers de New York» par «les Forestiers du nouveau York» ;-) J'ai aussi lu «Saint-Urbain street» (mais j'ai pas noté la page...). Ouate de phoque* comme dirait l'autre ;-)
Je me souviens que la traductrice française de Paul Auster (Christine Le Boeuf), dans le roman «Moon Palace» avait commis le même genre d'impair mais cette fois-ci, pour le base-ball.
En lisant «Le monde de Barney», j'ai compris pourquoi notre amie Jules m'écrivais, le 3 mai dernier que «Le monde de Barney m'avait énormément déçue...» ; c'est effectivement très montréalais, un Montréal que notre amie Jules n'a pu connaître et que je n'ai connu qu'en partie ; l'autre partie m'ayant été raconté surtout par ma mère, qui a un peu vécut ce Montréal de Barney.
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* traduction libre de «What the f...»
jeudi 23 juillet 2009
Traduction - 23 Juillet
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4 commentaires:
Un livre se passant à Montréal, traduit par un Français? Ah non, ça je serais pas capable!!!
Ouate de phoque, indeed!
Pour l'instant, à part ce que j'ai relevé, toujours pas de «problème» avec la traduction...
C'est vrai que je suis sévère avec les traductions, mais au-dela des erreurs factuelles, j'ai beaucoup de misère avec des expressions comme «faux drêche patenté» dans un roman se déroulant au Québec!
Mordecai Richler manque à ma culture, mais grâce à toi je me rappellerai qu'il faut absolument le lire en VO!
@Grominou
Oui, la VO sera sans doute plus intéressante. J'ai relevé d'autres petites perles dans le texte - j'en reparlerai. Et encore une fois, c'est surtout lorsque le traducteur s'attaque au hockey que je note des failles.
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