dimanche 4 novembre 2007

Compte de mots - 04 novembre


« J’ai en quelque sorte l’impression
qu’aux États-Unis comme ailleurs dans
le monde, en dépit de notre travail de
reporters, on ne comprends pas
beaucoup le Troisième Reich, ce qu’il est,
ce qu’il prépare, où il va
».
- William Shirer, Mon journal à Berlin, 27 septembre 1937




Pas évident de parler d’un livre que vous ne pourrez sans doute jamais lire - à moins d’être chanceux. J’ai terminé la lecture du dit livre depuis plus d’une semaine maintenant, mais m’étant pris d’affection pour son auteur, j’ai passé des soirées à faire des recherches sur son oeuvre, délaissant de fait le blogue et mes autres lectures...
Quel est donc ce livre si rare ? Il s’agit de « Mon journal à Berlin » (journal d’un correspondant étranger 1934-1941) de William L. Shirer. Publié une première fois en 1941 aux États-Unis et traduit et imprimé une première fois en français en 1943 à Montréal, ce journal n’a jamais fait l’objet d’une réimpression sérieuse en français depuis, hormis une édition chez Hachette en 1946[1]. Et c’est dommage car ce journal est un témoignage de première main sur la montée du nazisme en Allemagne, vue de l’intérieur.

« Et maintenant ce sont les ténèbres.
Un monde nouveau. L’obscurcissement,
les bombes, le massacre, le nazisme,
Maintenant c’est la nuit, l’épouvante et la
barbarie.
»
Berlin, 8 octobre 1939, p.224

Il est vrai qu’il existe toutes sortes de documents du genre aujourd’hui (il s’en publie de nouveaux à tous les ans) mais le livre à ceci de particulier qu’il fut publié pendant que se déroulait les événements tragiques en Europe. Pas après ! « Mon journal à Berlin » c’est l’histoire au jour le jour d’un journaliste qui assiste, impuissant, aux balbutiements et à la naissance de la deuxième guerre mondiale.

« Je parie que d’ici quelques semaines la
guerre fera rage dans toute l’Europe. Et,
finalement, on utilisera toutes les armes:
bombardement des villes ouvertes, gaz et tout.
»
Berlin, 7 mai 1940, p.311

Il existe une suite à ce journal (en anglais seulement). J’ai bien l’intention de me procurer cette suite de même que quelques autres ouvrages de l’auteur. Je crois aussi qu’il serait temps de réhabiliter le bonhomme. Ses oeuvres ont souvent fait l’objet de contestations de la part d’historiens et d’intellectuels qui, il faut bien l’avouer, enviaient son succès. Et c’est d’autant plus facile d’attaquer Shirer aujourd’hui, maintenant qu’il n’est plus là pour se défendre. Non pas que Shirer fut infaillible, mais les attaques furent – et sont encore - souvent dures.

« Plusieurs de ses ouvrages eurent un grand
succès populaire et furent primés, mais firent
l’objet de critiques d’historiens pour leur
faiblesse à l’aune des exigences universitaires
et pour leur coloration par certains parti-pris
».
- via Wikipédia

Comme des millions de personnes à travers le monde, j’ai lu son histoire du Troisième Reich (Le Troisième Reich des origines à la chute). Les deux tomes me suivent depuis, diantre ! depuis que j’ai quitté le nid familial ! Et je suis pas prêt de m’en départir.

- William L. Shirer - Rome, Circa 1940. Sans doute février 1939, à la mort du pape Pie XI, (voir p.155 du Journal)


un mot sur l'auteur.
Né le 23 février 1904 à Chicago et décédé le 28 décembre 1993 à Boston, William Lawrence Shirer fut tout à tour journaliste, historien et écrivain. Si Shirer s’est surtout fait connaître avec The Rise and Fall of the Third Reich en 1960 (en français Le Troisième Reich des origines à la chute), c’est avec ses émissions de radio en provenance de Berlin qu’il s’est tout d’abord fait connaître du public américain. Dans les années 50, un peu trop près de la gauche américaine aux yeux du gouvernement et victime du maccarthysme, il perdit son emploi de journaliste. C’est alors qu’il eut l’idée d’écrire son histoire de Troisième Reich, avec le succès que l’on sait. Il est décédé à Boston un peu avant son 90e anniversaire de naissance.

« Tout indique que nous avons fait un coup
extraordinaire en fait de reportage hier !
Nous avons été les premiers dans le monde
à annoncer la signature de l’armistice, sans
parler de la description détailée que nous
avons diffusée de la scène. [...] Jusqu’à ce
matin, je n’avais la moindre idée que nous
avions été les premiers à annoncer à avoir
annoncé la nouvelle.
»
Paris, 23 juin 1940, pp. 400-401

__________________
[1] le titre de l’ouvrage diffère quelque peu selon qu’il s’agit de l’édition canadienne publié par Les éditions de La Revue Moderne (Mon journal à Berlin, le journal d’un correspondant étranger 1934-1941) ou l’édition française, chez Hachette (A Berlin, journal d’un correspondant Américain, 1934-1941).



William L. Shirer
Mon journal à Berlin, le journal d’un correspondant étranger 1934-1941
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Albert Pascal
Les éditions de La Revue Moderne
Montréal, 1943, 2e édition

2 commentaires:

Blanche a dit...

Merci pour toutes ces informations sur ce livre oublié!
Cela me donne aussi envie de le lire!

Bob August a dit...

@Blanche
C'est tellement un plaisir immense que d'avoir de tes nouvelles et de te lire. Si j'étais ingrat je dirais que nous n'avons pas assez souvent de tes nouvelles, mais comme je ne suis pas ingrat, je ne le dis pas ;-)))